jeudi 30 janvier 2014

Pourquoi Google revend Motorola

En cédant Motorola à Lenovo, Google s'allège d'un fardeau financier mais conserve ses brevets... Tout en rassurant Samsung sur ses intentions et en renforçant Lenovo comme diffuseur d'Android.


Dix huit mois après son rachat, Motorola Mobility quitte le giron de Google
Dix huit mois après son rachat, Motorola Mobility quitte le giron de Google
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Avec la revente surprise de Motorola Mobility à Lenovo, Google résoud une série de problèmes que cette acquisition lui avait posés en dix huit mois.
Commentant cette cession, Larry Page, PDG de Google, lève, sur son blog, une partie du voile sur les motifs de cette décision qui étonne de prime abord. « Le marché des smarphones est ultra-compétitif et pour prospérer, mieux vaut être dedans complètement quand il s'agit de faire des terminaux mobiles ».
Ce commentaire est un véritable aveu d'échec. Google n'a pas réussi à se transformer en un industriel des smartphones rentable : l'activité de sa filiale a toujours été déficitaire.
Sur le dernier trimestre fiscal connu (juillet à septembre 2013), ses pertes d'exploitation se sont creusées. Elles ont atteint 21 % du chiffre d'affaire de cette activité contre 12 % un an plus tôt, en dépit d'un plan de restructuration drastique supprimant 4 000 postes et d'une relance du portefeuille de produits, symbolisée par le Moto X.
En cédant son activité smartphones, Google arrête donc l'hémorragie financière, tout en conservant le portefeuille de brevets qui avait motivé le rachat de l'industriel (voir encadré ci-dessous).

Google sécurise ses relations avec Samsung


En cédant Motorola, Google renonce à concurrencer ses licenciés Android
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« Ce mouvement va permettre à Google de consacrer son énergie à conduire l'innovation sur tout l'écosystème Android » ajoute Larry Page dans son commentaire. Il fait ici une allusion à un autre problème, plus structurant, qu'avait crée l'acquisition de Motorola.
 
Peut-on animer un écosystème mondial en licenciant un système d'exploitation mobile auprès d'industriels et les concurrencer en devenant à son tour fabricant de smartphones ?
La principale victime collatérale du rachat de Motorola Mobility n'était autre que Samsung. Or, le numéro un mondial des mobiles est surtout le premier diffuseur de plates-formes Android. La volonté de Google de devenir un acteur des smartphones n'a pu que conduire le Coréen à tenter de réduire sa dépendance vis à vis d'Android.
 
Google a su éteindre l'incendie qui couvait et menaçait sa stratégie mobile. En signant un accord stratégique de 10 ans avec Samsung, il y a quelques jours, puis en vendant son activité smartphones, il rassure son "grand allié objectif" sur ses intentions et évite qu'il ne se détourne trop d'Android.

Faire de Lenovo un contrepoids à la domination de Samsung

Enfin, en cédant Motorola Mobility à Lenovo, le géant américain en fait le numéro 3 mondial des smartphones. Il conforte ainsi l'ancrage de l'industriel chinois dans l'écosystème Android, dont il portera les couleurs dans le monde entier.
 
En Chine, Lenovo est déjà puissant avec 11 % de part de marché. Il contribuera à populariser le système d'exploitation de Google au moment où Apple passe à l'offensive en signant un accord avec l'opérateur China Mobile.
 
Google favorise aussi l'émergence d'un acteur mondial qui réduira, à terme, sa dépendance vis à vis de Samsung pour la diffusion d'Android. Lenovo a ainsi prévu d'utiliser le levier de la marque Motorola pour s'attaquer aux marchés nord-américain et européen, continents où elle bénéficie encore d'une renommée certaine.
 
La seule hypothèque qui pèse sur cet accord reste liée à l'obtention de l'accord des autorités américaines, comme c'est la règle pour toute cession d'activités à un investisseur étranger.

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